Debout devant lui et vêtue de la même combinaison noire se trouvait la fille que le jeune homme aimait le plus. Il ne comprenait pas cette nouvelle situation dans laquelle il se situait. Comment Jessabiel pouvait-elle être à la fois en face et à côté de lui ? Cela n’avait aucun sens. Jessabiel posa son index sur l’épaule de l’adolescent puis vint se placer devant lui.
- Alors comme ça tu ne sais pas où se trouve le Livre de la Damnation ? C’est vraiment dommage, dit-elle en s’asseyant délicatement sur lui.
- Jess…Jessabiel ! Comment ? Comment est-ce possible ? questionna Gadriel, immensément surpris.
- Ah ! Tu parles de ça ? Ce n’est qu’un simple enregistrement. Une petite farce de rien du tout pour te mettre en conditions, rétorqua la jeune femme en regardant brièvement derrière elle.
La demoiselle ouvrit par la suite son haut et montra à l’adolescent les traces laissées par l’objet ressemblant à une matraque électrique.
- J’admets que c’était déplaisant par moment mais…
- Pourquoi ?! Pourquoi faire tout ça ? Pourquoi me faire ça à moi? interrompit soudainement Gadriel.
- N’est-ce pas évident ? Tu n’es une étape nécessaire à l’accomplissement de notre objectif, lui répondit-elle.
- Une étape dis-tu ? Donc tous les bons moments que nous avons partagés…
- De la comédie. Crois-tu vraiment que de tous les êtres qui peuplent l’univers, c’est une personne comme toi que j’aurais choisie ? Un adolescent chétif incapable de se défendre lui-même, dit Jessabiel avec beaucoup de mépris.
A ce moment, Gadriel se repassait ses derniers bons souvenirs en tête. Il se revoyait aux cotés de cette jeune femme aimable qui lui souriait tout le temps, cette jeune femme qui voulait rester indéfiniment dans le ciel à observer les gamals voler majestueusement. Il se dit alors que la personne assise sur lui était un imposteur, qu’elle n’était pas la vraie Jessabiel mais plutôt un individu essayant de se faire passer pour elle afin de le briser psychologiquement.
- Tu n’es pas elle ! rétorqua soudainement Gadriel, le visage empli de colère.
- Pardon ?! s’exclama la jeune femme.
- Je ne sais pas qui tu es ni pourquoi tu as pris cette apparence mais tu n’es pas Jessabiel. La Jessabiel que je connais ne me dirait jamais ce genre de choses, déclara l’adolescent.
- On dirait bien qu’il est dans le déni, s’exclama brusquement Reigns qui se trouvait toujours dans la pièce.
- Il semblerait, confirma sa sœur.
Jessabiel approcha sa bouche de l’oreille de Gadriel et lui murmura quelques mots. Après les avoir entendus, des larmes coulèrent le long de son visage. Tels des miroirs, tous les bons souvenirs de la demoiselle se brisèrent en mille morceaux.
- Qu’est-ce qui tu lui dis ? questionna Reigns, intrigué par la réaction de leur prisonnier.
- La vérité, que la Jessabiel qu’il aime tant est morte depuis près d’un cycle et que je ne fais qu’occuper son corps, lui répondit-elle en se moquant de Gadriel.
Le frère jumeau rigola également de l’adolescent de n’avoir pas remarqué que sa sœur se jouait de lui depuis de nombreux mois. De son côté, la tristesse du jeune homme disparaissait petit à petit pour laisser place à une profonde colère, ce qui était un tant soit peu normal vu la tournure que prenaient les évènements. Son visage se froissa et ses yeux d’ordinaires bleu prirent une teinte légèrement rougeâtre. Au même moment, le cycle qui se trouvait au-dessus de la seule et unique porte de la salle s’illumina légèrement, ce qui provoqua le retour à la normale de la couleur des yeux de Gadriel.
- Reigns ! Ménage-le encore un peu. On dirait que monsieur a pris un peu confiance en lui, ordonna Jessabiel lorsqu’elle remarqua l’expression faciale de l’adolescent.
- Bien reçu ! répondit son frère.
La jeune femme se redressa, s’éloigna de quelques pas, et laissa place au bourreau qui prit un énorme plaisir à asséner de nouveaux coups de poing et pied sur le visage et le torse de Gadriel. Ces derniers étaient si violents que la chaise sur laquelle était attaché l’adolescent bascula brusquement en arrière. Dans la chute, il se fit mal à l’arrière du crâne. Reigns ordonna à deux des trois subordonnés présents avec eux de venir remettre le siège à sa place. Ils s’exécutèrent et, quelques instants plus tard, Gadriel se retrouvait dans sa position initiale. Jessabiel tapota l’épaule de son frère pour lui faire signe d’arrêter puis s’approcha de nouveau du prisonnier. Elle plaça ensuite son doigt au niveau de son visage et essuya la trace de sang au niveau de sa bouche.
- Mon cher et tendre Gadriel, sais-tu ce que ça fait d’être étranglé à mort ? lui demanda-t-elle.
Jessabiel s’assit sur Gadriel, approcha de nouveau sa bouche de son oreille, et lui murmura quelques mots.
- D’abord, tu sens la pression sur ta gorge, tes yeux larmoient, tu as un goût qui remonte, un goût très acide dans la gorge. Ensuite, une petite flamme en toi, dans ta poitrine, et ensuite…, ensuite le feu intérieur grossit, tes poumons sont envahis. Cela gagne la gorge, et tout le remonte dans aux yeux, et tout devient glace. C’est comme des aiguilles de glace dans tes orteils, puis dans tes doigts, sous tes ongles, dans tes bras. Tu vois des étoiles, toute ta vie défile devant tes yeux dans les moindres détails, et soudain c’est le noir.
La manière dont la jeune femme lui dit cela effraya énormément Gadriel. Il venait tout juste d’appréhender la suite des évènements, ce qui n’annonçait rien de très bon pour lui. Pendant ce temps, Jessabiel se redressa, le regarda droit dans les yeux, et lui fit son plus beau sourire.
- Mais avant tout, amusons-nous un peu. Apportez moi mon matériel, ordonna-t-elle aux subordonnés.
- Oui madame ! répondirent-ils.
Les deux hommes sortirent de la salle de torture et allèrent chercher ce qu’on leur avait demandé.
- Ça fait longtemps que je ne me suis pas exercée. J’espère que je ne suis pas rouillée, déclara Jessabiel.
- Tu rigoles j’espère ? Tu ne te souviens pas de ce que tu as fait à ton dernier cobaye ? Tu l’as tellement amochée qu’elle a fini brulée sur la majeure partie de son corps, intervint Reigns.
- Oui mais je te signale que malgré ça, tu as réussi à la laisser s’échapper. Que dire d’autre ? Ah oui ! Tu as fait un énorme trou dans son estomac alors qu’elle pouvait encore nous fournir des informations, s’énerva la jeune femme.
Face à leur conversation plus ou moins insolite, une information attira l’attention de Gadriel. D’après ce qu’ils venaient tous les deux de dire, ils étaient responsables de l’état dans lequel se trouvait sa mère lorsqu’il la revit, ce qui accentua la colère du jeune homme.
- Jamais ! Jamais je ne vous le pardonnerai ! s’exclama l’adolescent tandis que des images de sa mère souriante lui revenaient en mémoire.
Les yeux de Gadriel essayèrent à nouveau de changer de couleur pour prendre une teinte beaucoup plus rouge, mais le cercle magique situé de dessus de la porte les empêchait.
- Regarde le essayant de jouer au dure. Et que comptes-tu nous faire dans la positon dans laquelle tu te trouves ? demanda Jessabiel en le regardant droit dans les yeux.
Elle avait raison. Que pouvait-il leur faire attaché fermement à une chaise ? Ils avaient toute une armée à leur disposition et lui il était tout seule. Il n’avait aucune chance de l’emporte ni même de survivre. Le jeune homme resta donc silencieux face à sa question.
- C’est bien ce que je pensais, dit de nouveau la demoiselle devant le silence de Gadriel.
Les deux subordonnés revinrent en apportant avec eux deux charriots. Sur le premier se trouvaient divers instruments de torture tandis que sur le deuxième étaient posés une sphère transparente, un casque, un collier de prisonnier de plusieurs centimètres d’épaisseur, et un petit cristal. Ils placèrent les deux à coté de Jessabiel qui s’extasia devant l’arrivée de ses ‘bébés.’
- Bien ! Maintenant que mon matériel est là, le fun peut commencer, déclara la jeune femme.
- Bon, je ferai mieux d’y aller, dit Reigns en se dirigeant vers la sortie.
- Pas si vite ! Où crois-tu partir ainsi ? arrêta brusquement Jessabiel.
- C’est que…
- Tu restes avec moi. Il en va de même pour vous autres, ordonna la jeune femme.
La demoiselle tendit sa main vers le plateau et saisit un pic en acier de plusieurs dizaines de centimètres de long pour quelques millimètres de large. Elle s’approcha ensuite de Gadriel et attrapa sa main.
- Qu’est-ce que tu comptes faire avec ça ? Non ! Non ! s’exclama-t-il de peur.
Le bout pointu de l’objet pénétra juste en-dessous de l’ongle de l’index du jeune homme. Il se mit à hurler de douleur tandis que Jessabiel enfonça l’aiguille centimètre après centimètre. Reigns, qui se trouvait juste à côté, trouva ce traitement beaucoup trop éprouvant pour lui et décida donc de détourner le regard. Il ne pouvait cependant arrêter les hurlements qui lui donnaient la chair de poule. D’ailleurs, il n’était pas le seul à le faire. Hormis Jessabiel, toutes les personnes présentes dans la salle n’arrivaient pas à observer ce spectacle morbide.
La première aiguille ayant été convenablement installée, Jessabiel procéda à l’insertion des dix-neuf autres. Il fallut plus d’un vingtaine de minutes pour que la jeune femme transforme Gadriel en une sorte de porc-épic. Ce dernier qui avait supporté le choc jusqu’à présent était recouvert de sueur. Il avait également le cœur qui battait extrêmement vite, des larmes et de la morve qui coulaient le long de son visage, et une très grosse veine sur la tempe.
- Bien ! Maintenant que la première étape est terminée, nous pouvons passer à la suite, déclara-t-elle avec le sourire.
- Je t’en prie…pitié ! Pitié ! Arrête ! supplia le jeune Gadriel.
- Ma cher et tendre Gadriel. Hors de question que je m’arrête maintenant. Je commence à peine à musique, répondit la demoiselle avec un sourire morbide.
Jessabiel attrapa une autre aiguille sur le charriot. Cette dernière était différente des précédentes. Elle était en effet plus petite et présentait d’étranges motifs rouges sur toute sa longueur. La jeune femme enfonça celle-ci dans la clavicule de Gadriel. Celui-ci se remit à hurler de douleur et voulut même serrer les poings. Cependant, cela lui était impossible à cause des objets métalliques dans ses doigts. Son cœur battait à plus de deux cents à l’heure. Il avait même l’impression que ce dernier allait exploser d’un instant à l’autre.
Jessabiel inséra la seconde aiguille dans la seconde clavicule, puis attendit que ces dernières fassent effet. Comme elle s’y attendait, les deux objets métalliques se mirent à chauffer quelques secondes plus tard et à bruler le jeune homme. Sans surprise, Gadriel cria encore plus fort. D’ailleurs, ses hurlements étaient si forts que l’on pouvait les entendre dans les pièces avoisinantes. Ne pouvant plus le supporter, Reigns prit la direction de la porte.
- Je t’ai ordonné de reste ici ! s’exclama la jeune femme sur un ton très autoritaire.
- Ecoute Jess, je n’en peux plus tes délires. Tu as juste besoin d’extraire tous ses souvenirs et de tuer. Je vois pas pourquoi tu vas tout ceci. Ca me rend malade, dit-il en franchissant la porte.
La jeune femme se retint de se mettre en colère et préféra se concentrer sur son cobaye du moment. Concernant ce dernier, la douleur avait atteint un tel niveau que son cœur finit par lâcher. Constatant cela, Jessabiel ordonna à la soigneuse de le remettre en route immédiatement. Celle-ci s’approcha donc de Gadriel, posa ses deux mains sur son torse, et ferma les yeux. Quelques secondes plus tard, une première décharge électrique vint choquer le jeune homme, puis une seconde. A la troisième, le cœur de l’adolescent repartit de plus belle. Gadriel réouvrit ses yeux avec le visage empli de surprise. Immédiatement après, la douleur revint lui dire bonjour.
- Tu sais que tu m’as fait peur ? Je pensais que tu nous avais définitivement quittés, dit la demoiselle toute contente.
L’adolescent se retrouvait de nouveau dans cet enfer. Lorsque son cœur cessa de battre, ce dernier éprouva une sorte de soulagement, un sentiment de paix. Il se disait que l’heure était enfin venu pour lui, qu’il allait retrouver sa tendre mère. Malheureusement pour lui, la fille se tenant devant lui en avait décidé autrement.
- Bon ! Et si on s’occupait maintenant des coudes et des genoux, proposa-t-elle avec beaucoup d’entrain.
Jessabiel se dirigea de nouveau vers ses instruments et en attrapa deux. Le premier ressemblait à un clou verdâtre tandis que le second faisait plus penser à un marteau. Quand Gadriel la vit en possession de ces deux objets, son rythme cardiaque, déjà très rapide, s’accéléra encore plus.
- Veuillez à ce qu’on ne le perde plus cette fois-ci ! ordonna-t-elle à la soigneuse.
- Oui madame ! lui répondit-elle.
Celle-ci se plaça alors derrière Gadriel tandis que sa supérieure positionna la pointe du clou juste au niveau de son genou. La respiration de l’adolescent devint plus rapide tandis qu’il anticipait ce qui était sur le point de se produire. Sans le ménager, Jessabiel frappa un bon coup à l’arrière de l’objet qui pénétra sans difficulté dans son fémur. L’adolescent hurla si fort qu’au bout d’un moment, il cessa de produire le moindre son. Son cœur s’emballa et était même sur le point de lâcher à nouveau. Ce ne fut que grâce à l’intervention de la soigneuse que l’organe parvint à résister au premier choc.
Un deuxième coup de marteau retentit et le clou s’enfonça entièrement dans l’os, ne laissant plus que la tête visible. Jessabiel s’occupa par la suite de l’autre genou puis attendit que les deux objets métalliques commencent à faire effet. Contrairement aux aiguilles qui brulaient continuellement Gadriel, ces deux clous le faisaient pourrir de l’intérieur. A cause de cela, il s’en suivit une hémorragie. La jeune femme n’ordonna cependant pas à la soigneuse de s’en charger. Elle préféra insérer le reste de ses objets métalliques verdâtres dans les coudes de l’adolescent.
- Hé voilà le travail ! s’exclama-t-elle de joie une fois qu’elle termina.
Jessabiel alla déposer le marteau à sa place puis se dirigea vers le second charriot. Elle y attrapa le casque et le collier de prisonnier qu’elle vint placer sur Gadriel. Elle ordonna ensuite à ses subordonnés de défaire tous les liens qui le retenaient à son siège. Après avoir exécuté leur ordre, l’un des deux en reçut un nouveau lui demandant d’apporter le cristal posé sur le charriot.
- On s’est bien amusé jusqu’à présent mais toutes les bonnes choses ont une fin, dit Jessabiel une fois l’objet en main.
La jeune femme glissa son doigt de bas en haut sur la surface lisse et le collier que Gadriel portait autour du coup réagit. Petit à petit, le corps de l’adolescent se leva avant de finir sa course plusieurs dizaines de centimètres au-dessus du sol. Non seulement il commençait à étouffer, mais à cause de tout ce qu’il avait dans le corps, le fait d’avoir tous les membres tendus provoquait une atroce douleur. Dans ces conditions, le jeune homme ne pouvait même pas réfléchir correctement. Comme elle le lui avait dit, sentant sa mort inéluctable approcher, tous ses souvenirs ; mêmes ceux qu’il avait oubliés ; refirent surface et défilèrent devant ses yeux. Le casque sur sa tête les envoya ensuite dans la sphère transparente qui se remplit par la suite d’une substance liquide multicolore. Finalement, après plus de deux minutes d’agonie, Gadriel cessa de se débattre et rendit son dernier souffle, ne laissant derrière lui que des livres, des regrets, et le bruit d’une explosion soudaine.
A suivre !!!
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