“La mort c’est comme l’amour, on ne peut pas deviner quand, où et comment elle vient.”__Auteur inconnu //
Était-ce ces derniers instants? Allait-elle vraiment mourir à cet endroit sans voir pour la dernière fois sa famille? Telles étaient les questions que la jeune fille se posait.
Voir de ses propres yeux la mort et le cadavre de Christ se faire jeter dans la rivière l’avait tellement choqué et horrifiée qu’elle n’avait pas pu empêcher son urine de s’écouler le long de ses jambes. Elle avait perdu l’équilibre et s’était laissée tomber sur le sol.
Elle était complètement tétanisée face au monstre qui s’approchait lentement d’elle. Les mots bloqués au fond de sa gorge, elle tremblait telle une feuille morte. Assise à même les pierres glacées qui jonchaient le pont, elle était statufiée, les yeux larmoyants constamment fixés vers l’endroit d’où était provenu le son. Elle avait l’impression d’entendre parfaitement les battements de son coeur, tels un bourdonnement dans son oreille. Le claquement intermittent de ses dents et ses yeux grands ouverts remplis de peur la laissaient pantelante face à sa détresse.
Au fil des secondes les deux yeux n’avaient toujours pas bougé et la regardaient toujours rendant le moment assez effrayant. Après une attente insoutenable, elle aperçut enfin un peu de mouvement de la part de l’atrocité. Quand elle commença à s’approcher, Elsy se rendit compte que les yeux, au fur et à mesure de leur avancée, perdaient de la hauteur. Quand elle sortit enfin de la pénombre, c’est face au petit garçon de tout à l’heure que son regard se posa. C’était assez étrange. En considérant la hauteur à laquelle les globes oculaires de la créature étaient , 3 mètres du sol, la personne qui en sortait ne correspondait pas à son analyse, rendant ainsi la situation dans laquelle elle se trouvait assez sinistre.
Ses pas résonnaient étrangement dans les oreilles de la jeune fille. Le petit homme au sourire sardonique, s’approchait lentement vers elle. De plus près et grâce à la lumière des lampadaires placés aux abords de la ville, Elsy pouvait à présent contempler la beauté renversante de l’individu qui allait être son bourreau. Avec des traits de visages assez féminins et ses yeux rieurs, elle ne savait plus trop quoi penser, si c’était juste un cauchemar et donc qu’elle ne s’était jamais réveillée et n’avait pas commis la bêtise de sortir, ni de traîner.
Quand il fut près d’elle il s’accroupit pour se mettre à sa hauteur et comme précédemment laissa ses mains parcourir la peau de son visage parsemé de larme. Le sourire du monstre s’agrandit alors quand il pu lire tout l’effroi que renfermait ses yeux.
Il recommença alors ce qu’il n’avait pas put finir. Les actions qui dans d’autres circonstances devaient se révéler plaisantes la dégoutaient à présent énormément.
Voir et sentir ses mains se déplacer de son visage vers les parties inférieurs de son corps lui confirmait l’idée selon laquelle, elle allait à présent perdre sa vertu et peut-être même sa vie. Elle pouvait le sentir descendre lentement, doucement, caresser sa poitrine qui était à présent complètement dévêtu. Il s’amusait à malaxer les rondeurs de celle-ci, titillant leurs sommets. Il parcourait chaque centimètre de peau laissé à découvert. Les quelques morceaux de vêtements qui lui restaient avaient complètement disparu ne laissant, après le passage de ses mains changées en épine, que sa culotte blanche.
Au fil de son avancée, la créature se transformait lentement en un amas de lierre épineux qui laissaient des blessures sur le corps dénudé d’Elsy, se délectant en même temps de son sang. Les lierres s’insinuaient lentement entre ses cuisses, frayant un chemin vers son intimité. Elle la caressait délicatement de part le tissu de son sous vêtement sans pour autant la pénétrer. La douleur, la honte et la culpabilité avaient laissé place à la lassitude. Elle espérait seulement que son calvaire prenne fin aussi rapidement que possible pour se libérer de cet enfer. Ses larmes s’étaient taries, laissant au yeux de la bête la vision d’un regard éteint, rouge et dénué de sentiment.
Bientôt, elle n’eut plus la possibilité de voir la lumière de l’astre lunaire qui éclairait avec douceur sa nuit d’horreur. Les lierres la recouvrait à présent tel un sarcophage contenant un cadavre. Elle sentit que son enveloppe se soulevait et se déplaçait dans les airs.
Pourquoi n’en finissait-il pas déjà ? Est-il ce genre de psychopathe qui aimait faire durer son plaisir en jouant au maximum avec sa proie tel un chat face à une souris? Devait-elle s’endormir paisiblement pour ne pas vivre son viol ou devait-elle l’affronter? Elle ne savait plus trop quoi faire d’autant plus qu’elle n’arrivait pas à perdre conscience malgré l’incident troublant qui se déroulait.
Quand son espoir s’était finalement évanouit, sans qu’elle ne sache pourquoi tout s’arrêta. Tout d’abord les liens qui la retenaient s’évanouirent et disparurent. Puis c’est le souffle du vent qui l’agressa à cause de son corps dénudé et enfin les lames d’eau glacée qui la réveillèrent de son songe. Elle était à présent entrain de s’enfoncer dans les profondeurs du lac, suivant le même chemin que Christ avait pris précédemment dans sa chute. N’arrivant malheureusement toujours pas à bouger, ni à se débattre face à la fatalité, elle ferma lentement les yeux, ressentant la douleur causée par l’afflux d’eau dans ses poumons.
Elle eut juste le temps d’apercevoir une silhouette qui avait plongé à sa suite et qui se dirigeait droit vers elle, les mains élancées dans sa direction. Seule la couleur cramoisie de ses cheveux marqua ses pupilles avant qu’elle ne les ferme définitivement.
Les évènements s’étaient déroulés assez rapidement. Étant assez accaparé par sa nouvelle proie, le monstre ne s’était pas rendu compte que son précédent adversaire était de retour, plus flamboyant qu’avant. Les cheveux et les yeux du jeune homme étaient à présent rouge sang et flamboyaient telles des flammes s’embrasant sur un morceau de bois sec. Il n’a donc pas pu voir le coup arriver et se l’ai pris totalement, le déstabilisant et le faisant lâcher la jeune fille qui tomba dans l’eau du lac. N’ayant pas les réflexes nécessaires pour éviter la seconde attaque, il remarqua tardivement l’heptagramme qui s’était déssiné sous ses pieds et qui l’empêcha de faire le moindre mouvement.
C’est assez étonné et stupéfait par le revirement de situation qu’il entendit, impuissant, la voix de son opposant qui se mit à psalmodier une incantation qui, il le savait, allait le renvoyer dans les ténèbres.
- – “COLTERIA magica data exilia venire ad me ut faciam tibi. Vim extermina malum a facie mea, et aperire portas et damnatorum adiunxit. Poena signatum ad impia Tartara unde numquam egredi enim removentur. “ (1)
Aussitôt dit qu’une lumière entoura la bête et s’éleva très haut dans le ciel. Des chaînes sortirent elles aussi de la terre le contraignant puis on le vit disparaître lentement, attiré par le trou noir béant qui venait de s’ouvrir en dessous de lui. Il se mit alors à pousser un rire démoniaque puis émit ces derniers mots.
- – Tu crois peut-être que tu en as fini avec moi grâce à la suppression de ton sceau, mais je reviendrai sois en sûr. Il me punira pour ne pas t’avoir achevé mais tu ne t’en tireras pas à si bon compte…
Dès qu’il eut complètement disparu, le jeune garçon plongea dans l’eau froide du lac pour essayer de sauver celle qui venait d’y tomber. Quand il réussit à la repérer dans l’eau trouble, il nagea aussi vite qu’il put pour la rattraper. Dès qu’il arriva à sa hauteur, il ne perdit pas un instant et la ramena à la surface. Il se dirigea alors vers une berge puis déposa son corps inanimé sur la surface plate qui lui faisait face. S’apercevant qu’elle avait dû absorber une trop grande quantité d’eau, il se hâta de lui appliquer les premiers soins notamment le bouche à bouche tout en lui administrant un peu de magie pour réchauffer son corps glacé et soigner ses blessures.
Se forçant à ne pas prêter attention à sa nudité il s’empressa d’éffectuer sa tâche. Malheureusement il se rendit très vite compte que sa démarche ne faisait aucun effet. Le corps de sa patiente absorbait ses pouvoirs comme une éponge sans les laisser agir. C’était un phénomène assez étrange pour lui car normalement et aux dernières nouvelles, les humains n’avaient plus la résistance suffisante pour pratiquer la magie.
Les humains ne pouvaient pas utiliser ou encore stocker le latum(*), l’énergie nécessaire pour exercer la magie, dans leurs corps. C’était l’espèce la plus fragile et faible de toute la création. Même si ils avaient pu évoluer dans d’autres domaines tels que la sciences ou encore l’armement, il n’en demeure pas moins qu’ils étaient toujours aussi inoffensifs face à la puissance de la magie. Seuls quelques rares élus naissaient avec le don de dompter ce pouvoir. Mais la plupart d’entre eux avaient fui leurs terres natales il y a bien longtemps pour rejoindre le royaume céleste.
En effet entre l’an 1450 et 1750, l’humanité a mené une guerre constante contre eux, les menant au bûcher. C’était la période de la grande chasse aux sorcières. Des milliers d’hommes et de femmes ont péri accusé souvent à tort d’actes plus horribles les uns que les autres. De plus, Argos le roi des ténèbres se rendant compte de leur immense potentiel s’était aussi mis à leurs chasses, les massacrant quand ils ne voulaient pas devenir les sujets de ses expériences. Les survivants apeurés finirent par prendre la fuite et furent recueillis au ciel.
Il se retrouvait donc dans un cul de sac ne sachant plus trop quoi faire pour l’aider. Il avait réussi à lui faire recracher l’eau retenu dans sa poitrine mais il n’arrivait toujours pas à réchauffer son corps rapidement. il fit alors apparaître dans sa main droite une petite bouteille contenant un liquide rouge verdâtre. Sachant qu’elle n’allait pas pouvoir l’avaler toute seule, il mit tout le contenu du flacon dans sa bouche puis le lui passa directement par un baiser. Dès qu’il eut finit, une douce lumière couleur or émana d’Elsy et recouvrit tout son corps. Quand la luminosité s’estompa, les blessures sur son corps avaient complètement disparu comme emportées par l’extinction de cette dernière. Il créa aussi deux grosses couvertures puis l’enroula à l’intérieur.
Patientant quelques minutes, et après quelques vérifications; c’est avec soulagement qu’il constata que la température de son corps était revenue à la normale. Se soignant à son tour et réchauffant son corps grâce à sa magie, le jeune garçon finit par s’asseoir à côté d’elle, épuisé. Ses vêtements avaient encore quelques vestiges du combat qui venait de se terminer. Sa chemise déchirée par endroit, n’était plus dans son pantalon et les trois boutons du haut étaient ouverts. Il avait aussi repris sa forme première. Les surnaturels ne pouvait pas utiliser la totalité de leurs pouvoirs sur terre.
C’était la principale conséquence du limitateur, une turquoise présente à la base de l’arrière de leurs cous. Cette dernière les empêchait d’interférer dans les affaires humaines autres que dans le cadre de leurs protections. Ainsi, le jeune homme, fixant l’astre lunaire, murmura quelques mots.
- -Comment cela se fait-il qu’il puisse encore avoir des sorcières sur terre. Je croyais qu’elles avaient complètement disparu de la surface. C’est vraiment étrange…
C’est à ce moment qu’un petit portail apparut et un espèce de petit gobelin ailé en sortit avec dans sa gueule un fourreau qui devait surement contenir une arme.
- -Oui, il semblerait bien que ce soit le cas. D’après ce que je sais les dernières ont disparu il y a des années, après la chasse aux sorcières. Les juges célestes ont ouverts des portails dans les grandes villes de massacre comme Salem et Sélestat. Elles ont la capacité de manipuler le Latum qui est présent partout autour de nous, en d’autres termes de pratiquer la magie, émis le petit diablotin avec fierté.
Le jeune garçon le regarda incrédule, les yeux lançant des éclairs.
- -Toi c’est maintenant que tu te pointes, toujours après la bataille. Le point positif est que tu ais retrouver ma véritable arme, répondit-il ironiquement.
- -Vous êtes toujours aussi aimable mon petit juge. Être votre familier est un si bel enfer….
- -Abrèges et revenons sur le précédent sujet. A cause de ton étourdisme, tu l’as perdue et j’ai failli y rester aujourd’hui, lui coupa t-il énervé.
- -Vous êtes vraiment rancunier… Je savais très bien que vous vous en sortiriez malgré le limitateur et la perte de votre épée, émit-il avec un rire gêné sans le regarder dans les yeux.
- -Mais bon, pas besoin de m’en vouloir, tout est fini à présent. Par rapport aux sorcières et sorciers, quand j’étais bien plus jeune, mes parents me racontaient souvent leurs histoires et ils disaient que rien ne pouvait égaler leurs beautés. Ils étaient assez populaires parmi les célestes en ce temps. C’était l’élite parmis les humains et ils possédaient tous une beauté assez singulière, émit-il avec un ton couvert de louanges et en faisant des gestes élogieux.
- -Tu dis qu’elles étaient magnifiques hum… A la vue du spécimen que j’ai devant moi, j’en viens à en douter. Mais je ne peux pas vraiment affirmer, simplement à cause de ce petit incident qu’elle en fait partie.
- -Qu’est ce qui vous fait dire ça maître Fanel? Le fait que son corps puisse absorber votre magie en est déjà une preuve, répondit fièrement le petit monstre.
- -Tu as peut-être raison. Malgré tout je préfère qu’elle soit examinée par un détecteur et la faire utiliser une extension de sorciers. On doit confirmer si l’énergie qu’elle réussit à emmagasiner, peut être réutilisée. Je préviendrai au préalable mes parents pour que l’on puisse trouver une façon de régler ce problème. Il faut la mettre en sécurité assez rapidement. Nous ne serons pas les seuls à la vouloir si elle est réellement une sorcière, dit-il avec la mine grave.
Tout en terminant sa phrase, Il se leva tout en la prenant dans ses bras, toujours emmitouflée dans les couvertures.
- -Maintenant je crois qu’il est temps de la ramener chez elle, elle ne peut pas rester ici. Je te confis mes armes Schneil. Je compte sur toi pour ne plus les perdre sinon tu feras un séjour chez ma mère. Tu sais combien elle t’adore, émit-il étrangement.
Le familier sembla se remémorer des souvenirs puis se secoua la tête. Il créa alors un portail puis disparut à l’intérieur laissant Fanel et Elsy seuls. La fixant alors plus attentivement, il pinça ses joues puis se mit à sourire avec chaleur.
- -A regarder de plus près c’est vrai qu’elle n’est pas si moche que ça. Tu es plutôt mignonne, lui chuchota t-il près de son visage.
Continuant à la taquiner encore quelques secondes pendant son sommeil, il finit par déployer de grandes ailes blanches dans son dos puis s’envola dans le ciel nocturne. Il sonda son esprit et après avoir trouvé sa maison, l’emmena chez elle. Le jeune homme passa par la fenêtre de sa chambre et la déposa dans son lit doucement. Il fit disparaître les couvertures puis réapparaître son pyjama. Il avait vu un aperçut de ce dernier quand il avait visité sa mémoire. La disposant correctement puis la recouvrant de ses draps, il voulait préserver la chaleur dont elle aurait besoin pour ne pas tomber malade.
S’attardant un peu dans sa chambre, il en fit le tour en examinant minutieusement ce qu’elle possédait. Il espérait trouver une preuve de ses origines de sorcière mais fut très vite déçu. C’était la chambre banale d’une adolescente fan d’histoires fantastiques et de légendes. N’avançant en rien, il retourna auprès d’elle et essaya une nouvelle fois de lui transmettre ses pouvoirs. Le résultat fut le même. Ils se faisaient absorber et s’évaporaient à son contact sans faire le moindre effet. Arborant un petit sourire satisfait, il se détourna d’elle puis sortit par la fenêtre.
Il n’avait par contre pas du tout remarqué la présence qui l’observait derrière la porte de la chambre.
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(1)COLTERIA magie du bannissement viens à moi je te l’ordonne. Effaces de ma vue le mal et ouvres les portes des condamnés. Ton châtiment est scellé, retournes dans les ténèbres d’où tu n’aurais jamais dû sortir, car tu es banni.
(*) Le Latum est l’énergie existentielle, vitale présente partout autour de nous. C’est l’un des cadeaux laissé par les Dieux. Les sorciers, humains qui y sont sensibles, ne peuvent pas l’utiliser sans un réceptacle. Les magiciens, êtres du royaume céleste, l’utilisent librement.
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