La promotion 12

Sous les regards attentifs de Jessica et du garde de corps, la séance de photo se déroulait sans accroc. Michael, avec l’aide de son ami de toujours, ne manquait pas une occasion d’immortaliser la charmante mademoiselle Degrâce. Suivant les indications du jeune homme et combinant cela avec ses longues années d’expérience, Elène enchainait aisément et rapidement les poses. Un moment, elle se tenait droite avec les bras croisés et un regard empli de fierté disant « contemplez la beauté que vous n’obtiendrez jamais », et l’instant d’après, la jeune femme était légèrement penchée vers l’avant et mettait en avant ses généreuses formes tout en affichant un sourire aguicheur.

De nombreuses minutes s’écoulèrent et le temps fut venu pour la jeune femme d’enfiler une autre tenue. Elle repartit donc en direction de la cabine d’essayage en compagnie de Jessica. Se trouvant seul auprès du garde du corps de la demoiselle, un lourd silence régnait entre les deux hommes. Michael essaya tout d’abord de tripoter son appareil photo, changeant de nombreux réglages, mais au bout de cinq minutes, l’atmosphère commença à devenir pesante. Il décida donc d’entamer une petite conversation avec cet individu vêtu de noir.

  • Sinon, ça fait quoi de travailler pour mademoiselle Degrâce ? lui demanda-t-il.

L’homme resta silencieux devant la question du fiancé de Natacha, ne lui lançant qu’un regard indiquant qu’il n’avait point envie de converser. Après près d’une vingtaine de minutes qui lui semblait être une éternité, Jessica et Elène revinrent sur le plateau. La première portait désormais un ensemble noir composé de talons aiguilles, d’un pantalon, et d’une veste dont le profond décolleté ne laissa pas le jeune homme indifférent. Après avoir repris ses esprits, Orzak invita de nouveau mademoiselle Degrâce à s’installer sur le plateau où la nouvelle prise de photos se poursuivit.

Plus d’une heure et demie s’écoula et la demoiselle en était à sa cinquième séance. Elle demanda alors à faire une petite pause, le temps de se ressourcer. Le groupe composé de Jessica Plano et du garde du corps redescendit au rez-de-chaussée afin de trouver une petite collation à la jeune femme. Se retrouvant désormais seule avec Michael, cette dernière en profita pour faire plus ample connaissance.

  • Alors, dites-moi, qu’est-ce que ça vous fait de travailler dans un studio de photographie ? questionna la demoiselle.

Effectuant à ce moment de nouveaux réglages sur son appareil, le jeune homme se retourna vers elle, légèrement surpris par sa question.

  • Je trouve que c’est plutôt pas mal. On y rencontre pleine de monde, répondit Michael.
  • Je vois. Mais qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce genre d’activités ? demanda une fois de plus Degrâce.
  • L’immortalité, dit-il.
  • Pardon ?! s’exclama la jeune femme.

Elène Degrâce ne comprenait pas où son interlocuteur entendait par là. Devant l’expression confuse de la demoiselle, Michael apporta plus de précision.

  • Cela va peut-être vous sembler stupide venant de ma part, mais quand je prends un objet, un paysage, ou une personne en photo, c’est comme si je capture son essence à un moment très précis. C’est compliqué à expliquer, mais dans chacune de mes photographies se trouve un fragment figé dans le temps contenant toutes les belles entités qui composent notre monde et que les autres ne prennent pas le temps de contempler, déclara le jeune homme.

En l’écoutant parler, la demoiselle put littéralement sentir la passion qui l’habitait. Elle trouvait ça plutôt agréable de voir à quel point il aimait ce qu’il faisait.

  • Je ne trouve pas vos propos stupides, bien au contraire. C’est admirable de vous voir si passionné par ce que vous faites, rétorqua la jeune femme.

Un bref moment de silence s’installa entre les deux avant Michael ne décide de le briser.

  • Et vous, mademoiselle Degrâce, qu’est-ce qui vous passionne dans la vie ? demanda-t-il par la suite.
  • Je ne pense pas vraiment avoir de passion, répondit la demoiselle.
  • Non ! Vous n’allez tout de même pas me dire qu’une si belle femme que vous ne possède pas une activité qu’elle apprécie par-dessus tout. Allez ! Je suis sûr que si vous y réfléchissez bien, vous trouverez sûrement quelque chose qui vous plait, rétorqua Orzak.

Après un bref moment de réflexion, mademoiselle Degrâce finit par lui donner une réponse.

  • Si je devais choisir parmi tout ce que je fais au quotidien, alors je dirais que ce serait le dessin d’art, lui dit-elle.
  • Mais c’est excellent ça ! s’exclama joyeusement le fiancé de Natacha.
  • Pas vraiment. Je ne les trouve pas…hum…comment dire, accomplis. Il est certes vrai que je possède un certain talent pour reproduire des figures simples, mais je ne me vois pas encore atteindre le niveau des plus grands, déclara Elène.
  • Il vous faut donc persévérer. Peu importe le temps que cela vous prendra, tant que vous ne perdez pas votre objectif de vue, que vous n’abandonnez pas, alors vous réaliserez certainement votre projet, rétorqua le jeune homme.

Les mots de Michael allèrent directement au cœur de la demoiselle qui le remercia juste après pour ses encouragements. Les deux parlèrent ensuite de divers sujets de conversation, plus précisément des sujets liés à leurs activités professionnelles. La jeune femme voulut alors lui poser une question assez personnelle, mais au moment où elle s’apprêtait à le faire, Jessica et son garde du corps revinrent avec les rafraichissements et les quelques croissants qu’elle avait demandés.

  • Voilà, mademoiselle Degrâce ! Exactement ce que vous avez demandé, rétorqua la patronne de Michael.
  • Merci beaucoup, répondit-elle.

Alors qu’elle saisissait, sourire aux lèvres, un des verres tendus par la jeune femme en face d’elle, Elène Degrâce ne pouvait s’empêcher d’être légèrement frustrée. Elle aurait voulu que ces deux n’arrivent pas aussi vite. Quoi qu’il en soit, la demoiselle se dit qu’elle aurait d’autres occasions pour la lui poser.

Après une petite quarantaine de minutes de pause durant lesquelles la jeune femme enfila une nouvelle tenue, la séance de photos reprit. Comme précédemment, Michael invita mademoiselle Degrâce à prendre place sur le plateau de shooting. Les flashs de l’appareil inondèrent la scène et capturèrent le moindre petit détail de la sublime créature qui se trouvait devant eux. À chacune de ses prises, Michael Orzak ne pouvait s’empêcher de trouver Elène de plus en plus magnifique. Néanmoins, sa beauté n’était rien comparée à celle de la femme qui occupait en permanence son cœur et ses pensées.

Au moment où sa fiancée traversa son esprit, le jeune homme se déconcentra légèrement et pensa une nouvelle fois au comportement qu’elle affichait depuis quelques jours déjà. Bien qu’elle lui avait parlé de la pression qu’elle subissait sur son lieu de travail, Michael ne pouvait s’empêcher de se dire qu’il y avait quelque chose qu’elle ne lui disait pas. Il le sentait au plus profond de son être. Orzak essaya de faire le vide dans son esprit et de se reconcentrer sur son travail.

—–*—–

Il était aux alentours de 15h30 lorsque la séance de photos se termina. Jessica se retrouvait cette fois-ci aux côtés de son employé qui rangeait soigneusement son matériel tandis que la très charmante Elène Degrâce se changeait dans la cabine d’essayage.

  • Vous aviez l’air de bien rigoler tout à l’heure. Je peux savoir de quoi vous parliez ? questionna soudainement mademoiselle Plano.
  • Nous parlions de nos passions respectives. Comme elle aime énormément le dessin, je lui ai tout simplement dit de ne pas abandonner les objectifs qu’elle s’était fixés, répondit le jeune homme.
  • C’est très sympa de ta part de l’encourager, dit-elle.
  • Je sais. Je suis le genre qui pense qu’un talent devrait être exploité à son plein potentiel, déclara Michael.
  • Je tiens toutefois à te prévenir de ne pas trop t’avancer sur ce terrain. Tu ne sais pas ce qui lui passe par la tête. On ne sait pas de quoi est capable ce genre de femme, rétorqua Jessica sur un ton assez sérieux.

L’avertissement de la jeune femme n’avait rien d’anodin. Durant les diverses séances de photos, elle avait remarqué la façon dont mademoiselle Degrâce regardait son employé. En tant que femme, elle savait très bien ce que cela signifiait.

  • Tu n’as pas à t’inquiéter pour moi. Je ne suis pas le genre à avoir des aventures, déclara le jeune homme sur un ton tout aussi sérieux.
  • Tu as intérêt. Si tu brises le cœur de Natacha, je te les briserai personnellement, dit-elle une fois de plus en baissant progressivement son regard vers l’entrejambe du jeune homme.

Michael sentit à ce moment une sorte de frisson parcourir tout son corps alors qu’il venait de comprendre ce qu’elle voulait dire.

  • Quelle femme terrifiante ! pensa-t-il juste après.

Pendant que les deux discutaient, Elène Degrâce enfilait les vêtements qu’elle portait au départ. La jeune femme était très frustrée et particulièrement en colère contre Jessica qui l’avait mainte fois interrompue depuis son arrivée avec les rafraichissements. Elle n’avait donc pas eu le temps de poser à Michael la question qui lui brulait tant les lèvres.

  • Maudite femme ! Tu as de la chance que ton studio fasse du travail de qualité. Si ce n’était pas le cas, il y a longtemps que je t’aurais démolie, dit-elle tout bas en ayant le poing plié.

En repensant à cette journée et toutes ces occasions manquées, la colère de la demoiselle augmenta drastiquement. Elle inspira profondément, puis expira quelques secondes plus tard. Elle réitéra la manœuvre de nombreuses fois jusqu’à ce qu’elle se calme. Ce fut à ce moment qu’elle se souvint d’une séance de photos durant laquelle elle aperçut un Michael déconcentré. Elle se dit alors qu’il n’avait pas pu résister à son immense beauté, ce qui la ravit énormément. Il n’y avait aucun homme dans ce monde qui pouvait résister à ses charmes. De nouveau de très bonne humeur, la jeune femme fit de se rhabiller et sortit par la suite de la pièce. Elle n’avait pas encore dit son dernier mot.

Devant la porte se tenait le garde du corps de mademoiselle Degrâce. Majoritairement silencieux durant toute la journée, ce dernier accompagna la jeune femme auprès de Jessica et Michael. Il était alors 16 heures.

  • Ce fut vraiment une journée très passionnante et pleine d’enrichissement ! s’exclama Elène.
  • Ravie que cela vous ait plu, dit Jessica juste après.
  • Après y avoir réfléchi, j’ai décidé que dorénavant, vous serez mon studio exclusif de photo, déclara-t-elle.
  • Je vous en remercie très sincèrement. Je vous promets que l’on ne vous décevra pas, rétorqua la propriétaire des lieux.
  • Il y a cependant une condition à respecter, ajouta brusquement mademoiselle Degrâce.

Surprise, Jessica lui demanda de quoi il s’agissait. Elène lui dit alors que Michael devait alors devenir son photographe attitré et en contrepartie, elle utiliserait ses relations pour augmenter la renommée de son établissement. Plano trouva l’offre très alléchante. Néanmoins, elle savait également ce qui se cachait derrière sa demande. La jeune femme hésita alors pendant quelques secondes avant de finalement accepter. Elle savait pertinemment ce que Degrâce voulait, mais avait confiance en Orzak, d’autant plus que ce dernier lui avait dit quelques dizaines de minutes auparavant qu’il ne comptait absolument pas se lancer dans une aventure. Elle n’avait donc aucune raison de refuser cette offre.

  • Excellent ! Roger vous apportera donc le contrat dès demain matin. Quant à moi, je suis impatiente de retravailler avec vous, lui dit-elle en arborant un charmant sourire.
  • Il en va de même pour moi, sorcière, rétorqua par la suite Jessica en pensant son dernier mot.

Les deux femmes se serrèrent la main avant que Degrâce ne prenne le chemin de la sortie. Sur son trajet, elle passa à côté du fiancé de Natacha qui venait à la rencontre de sa patronne.

  • Merci encore pour les encouragements, lui dit-elle lorsqu’il se trouva à son niveau.
  • Vous n’avez pas à me remercier. C’était tout à fait normal de ma part, répondit-il.

La jeune femme lui sourit, puis lui souhaita de passer une excellente soirée. Mike fit de même et la demoiselle, ainsi que son garde du corps, partit en direction de la cage d’ascenseur.

  • Cette femme est dangereuse ! s’exclama soudainement Jessica qui se trouvait derrière lui.

La présence de Plano surprit Orzak, mais pas assez pour que ce dernier sursaute.

  • Qu’est-ce qui s’est passé ? questionna-t-il.
  • Elle m’a fait une proposition que je ne pouvais pas refuser, répondit la jeune femme.
  • Et quelle est-elle ? demanda une fois de plus Michael.
  • À compter de demain, tu seras son photographe personnel. En contrepartie, elle va nous permettre de gagner une plus grande visibilité. J’espère que tu ne m’en veux pas d’avoir accepté ? rétorqua la propriétaire des lieux.
  • Pourquoi t’en voudrais-je ? Je trouve même que tu as bien fait. Une plus grande visibilité signifie plus de clients, donc une augmentation de salaire, dit-il en rigolant.
  • Je suppose, s’exclama-t-elle.
  • Sur un ton plus sérieux, tu n’as pas à t’en faire pour moi, je ne compte pas mettre les pieds hors du domaine professionnel avec elle, déclara le jeune homme.
  • Ce n’est pas ça qui m’inquiète. Ce n’est vraiment pas ça qui m’inquiète, dit Jessica une dernière fois avant de quitter Michael.

Se retrouvant désormais seul et légèrement confus par les dernières paroles de sa patronne, Orzak attrapa ses affaires et prit également la direction de la cage d’ascenseur. Il espérait alors que voir l’élue de son cœur avant la tombée de la nuit, même si cela était peu probable en cette période.

A suivre !!!

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