La promotion 31

Sur le trajet du retour, mademoiselle Barnes était totalement silencieuse. Après ce qui s’était passé quelques dizaines de minutes auparavant, il était tout à fait normal que la jeune femme se retrouve dans un tel état. D’ailleurs, son comportement actuel était un tantinet anormal, ce qui pouvait d’une part témoigner de la force de caractère dont elle faisait preuve afin de supporter tout ce qui s’était produit. 

Natacha avait donc ses yeux fixés sur les voitures qui circulaient à côté de celle de son patron. Elle ne pensait à rien, ou du moins essayait de ne penser à rien. De son côté, monsieur Invictus se remémorait les évènements de la première partie de la journée. Non seulement il venait de mettre la main sur une toute nouvelle société, ce qui allait à coup sûr lui rapporter énormément d’argent, mais il avait également passé un très bon moment avec la jeune femme assise à côté de lui. Il n’y avait rien qu’il appréciait plus que lorsque tout se déroulait comme il l’entendait.

Alors qu’il avait également les yeux rivés sur la route, l’homme d’affaires se souvint de l’appel de Délaïla qu’il avait reçu durant le déjeuner avec Cheng et Hong. Il voulut alors immédiatement la rappeler, mais préféra attendre d’être au bureau, cette dernière ayant sûrement des informations concernant mademoiselle Barnes. L’homme d’affaires jeta un coup d’œuf furtif à la jeune femme assise à côté de lui. À ce moment, il trouva Natacha très belle, surtout avec l’expression qu’elle affichait à cet instant, l’expression de quelqu’un qui faisait tout pour ne pas être affecté par les évènements. Cela donna de nouvelles envies à monsieur Invictus. Néanmoins, il ne pouvait pas laisser cours à ses pulsions, pas en ce lieu, pas devant Gordon.

Herman Invictus était à nouveau excité. Il réfléchit alors à comment se débarrasser de ce sentiment. La solution la plus évidente qui s’offrait à lui fut de demander à son chauffeur de faire un petit détour dans un autre hôtel afin que mademoiselle Barnes puisse une fois de plus l’aider à régler son problème. Ce n’était après tout pas l’argent qui lui manquait pour faire ce genre de choses. Néanmoins, l’homme d’affaires ne se resigna pas à le faire. Après quelques secondes de réflexion, il se dit qu’avoir du plaisir avec Natacha une fois par jour était amplement suffisant, d’autant plus qu’elle avait un grand rôle à jouer ce samedi. Rien qu’en imaginant l’évènement de ce jour-là, monsieur Invictus se retrouva avec une nouvelle érection.

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De nombreuses minutes s’écoulèrent et la cabine du véhicule était toujours aussi silencieuse. Gordon Botle dut jeter plusieurs coups d’œil à son rétroviseur juste pour s’assurer qu’il transportait bel et bien des gens derrière. Après quelques secondes de réflexion, le jeune homme se dit que cela aurait été très étrange si les deux personnes assises derrière lui venaient à s’adresser la parole après tout ce qui venait de se produire. Il en vint même à imaginer le type de conversation qu’ils auraient eu si cela se produisait.

Le bâtiment de monsieur Invictus était désormais en vue. Gordon estima alors qu’ils seraient tous sur place dans moins de trois de minutes. De son côté, mademoiselle Barnes était impatiente de retourner à son poste. Elle avait de plus en plus de mal à supporter d’être à quelques centimètres de cet homme. Si elle le pouvait, la jeune femme prendrait le premier vol à destination d’un endroit paumé du monde et referait sa vie là-bas, tout ça pour rester le plus loin possible de son patron. Malheureusement, elle ne pouvait pas. Comme il l’avait si bien dit, monsieur Invictus n’était pas le genre de personne à qui on pouvait vraiment échapper.

  • Mademoiselle Barnes, rétorqua soudainement l’homme d’affaires.
  • Oui, monsieur, répondit la jeune femme.
  • Vos services pour aujourd’hui ne sont plus requis. Vous m’enverrez le compte rendu de la réunion avec messieurs Cheng et Hong par courrier électronique. Gordon, tu me déposeras à l’entrée du bâtiment et elle, à sa voiture.
  • Oui, monsieur.

Mademoiselle Barnes ne comprenait absolument pas ce qui était en train de passer. Avait-elle fait quelque chose de mal qui avait poussé son patron à prendre une décision aussi spontanée ? Était-ce une façon pour lui de lui dire qu’elle était à deux doigts de se faire virer ? Natacha ne savait ni quoi dire ni quoi penser de cela. Ce qu’elle ignorait alors était que monsieur Invictus n’avait pas pris cette décision sur un simple coup de tête. L’homme d’affaires l’avait fait parce qu’il savait qu’il aurait du mal à retenir ses pulsions pendant les quelques heures de travail qu’il lui restait. De plus, il voulait qu’elle prenne le temps de se reposer. Après ce qui venait de se passer, il savait très pertinemment que mademoiselle Barnes ne serait pas en mesure de faire convenablement son travail le lendemain s’ils venaient à passer un second moment seuls tous les deux.

Comme ordonnée par son patron, Gordon arrêta le véhicule devant l’édifice lui appartenant. Ce dernier souhaita alors une agréable fin de journée à sa secrétaire et descendit de la voiture. Botle conduisit ensuite mademoiselle Barnes dans le parking sous-terrain où elle descendit à son tour.

Se trouvant désormais seule, la jeune femme était indécise vis-à-vis de cette situation. Ce qui était cependant certain était le fait que toutes les émotions qu’elle avait intériorisées commençaient à monter. Natacha regagna donc vite son véhicule, mit le contact, et prit la direction de son domicile.

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Mademoiselle Harlock s’ennuyait énormément et était également frustrée. Il était vrai qu’elle avait du travail à faire, ce qui était amplement suffisant pour faire passer le temps. Néanmoins, la véritable raison derrière son état était le fait que son patron et sa collègue n’étaient toujours pas revenus de leur réunion. Cela faisait déjà plus deux heures qu’ils étaient à l’extérieur, ce qui était beaucoup trop long pour un simple rendez-vous avec des personnes sur qui un investissement allait probablement se faire.

Heureusement, la jeune femme n’allait pas rester dans cet état très longtemps. En effet, alors qu’elle était assise derrière son écran d’ordinateur à observer le texte sous ses yeux, la porte de son bureau s’ouvrit brusquement, laissant apparaitre son patron.

  • Monsieur Invictus, vous êtes de retour ? rétorqua mademoiselle Harlock, toute contente de le voir.
  • Il semblerait en effet, répondit-il sur un ton sarcastique.

Herman Invictus referma la porte derrière lui, ce qui étonna légèrement mademoiselle Harlock. Elle s’attendait à ce que sa collègue soit derrière lui. Cependant, ce ne fut pas le cas.

  • Natacha n’est-elle pas avec vous ? demanda-t-elle, curieuse.
  • Mademoiselle Barnes ne se sent pas bien. Je lui ai donc accordé le reste de la journée, dit l’homme d’affaires.

Mademoiselle Harlock se souvint alors que sa collègue n’avait pas l’air dans son assiette avant qu’elle parte avec son patron. Dès lors, elle n’avait aucune raison de douter des paroles de monsieur Invictus. Bien au contraire, avec Natacha absente pour le reste de la journée, Tess se disait qu’elle aurait peut-être une chance de séduire l’homme devant ses yeux.

  • Sinon, quelque chose d’intéressant s’est-il déroulé durant mon absence ? demanda monsieur Invictus.
  • Hormis quelques rapports, rien d’autre, monsieur, répondit la jeune femme.
  • Je vois.

L’homme d’affaires esquissa un léger sourire avant de prendre la direction de son bureau. Quelques secondes après s’être installé dans son fauteuil, il sortit son téléphone portable de sa poche et composa le numéro de Délaïla, son détective personnel. L’appareil sonna à peine deux fois avant que la personne à l’autre bout du fil ne décroche.

  • Délaïla, je suis seul. Tu peux maintenant parler, dit Herman.
  • Tu sais que j’ai une vie, n’est-ce pas ? Je ne peux pas arrêter ce que je fais à chaque fois que tu m’appelles, rétorqua la demoiselle, visiblement exaspérée par le comportement de monsieur Invictus.
  • Je suppose que je pourrais faire quelques exceptions, mais cela dépend entièrement de toi. Si tu veux voir le nombre de chèques gracieux que tu reçois être réduit, cela ne me dérangerait pas le moins du monde. Bien au contraire, cela me ferait quelques économies, dit Herman.
  • C’est bon ! J’ai compris !

Devant la menace voilée de l’homme d’affaires, la jeune femme n’avait nul autre choix que lui obéir. Comme il venait de le dire, les montants astronomiques qu’il lui donnait étaient une chose dont elle ne pouvait pas se passer aisément.

  • Je suppose que ton appel de tout à l’heure signifie que tu as de bonnes nouvelles à me confier.
  • On peut dire ça en effet. J’ai fait quelques petites recherches et j’ai obtenu ce que tu m’as demandé. D’après ce que j’ai découvert, le fiancé travaillerait dans un studio de photographie appartenant à une certaine Jessica Plano. De plus, il semblerait qu’elle ait récemment signé une sorte de partenariat avec Elène Degrâce, un top-modèle assez connu dans le milieu et du public. J’ai compilé tout ce que j’ai trouvé sur eux et je t’ai envoyé ça par courrier électronique.
  • Je vais voir ça tout de suite. Et concernant Elijah Fujitora ? rétorqua l’homme d’affaires en allumant son ordinateur.
  • C’est à ce niveau que les choses se compliquent un peu. Je n’ai trouvé pas grand-chose sur lui et le peu que j’ai découvert n’a rien de compromettant. Il a 25 ans, est PDG d’Olympus, et n’a commis aucune infraction. C’est une personne sans histoire.

Herman Invictus ne pouvait pas croire ce que venait de lui dire son détective privé. Dans le monde dans lequel il vivait, il était impossible qu’une personne disposant de moyens assez conséquents soit dépourvue de vice. Pour lui, monsieur Fujitora n’était pas une exception. Il était juste excellent pour masquer ses traces.

  • Et au niveau sentimental ?
  • J’ai également fouillé de ce côté et je n’ai rien trouvé de concret. Il est célibataire sans enfant et sans la moindre conquête. Aussi, de ce que j’ai appris avec le peu de temps que j’avais devant moi, il semblerait qu’il vive sur son lieu de travail.
  • Continue de chercher. Quelqu’un qui passe tout son temps sur son lieu de travail doit forcément cacher quelque chose.
  • OK, je vais continuer de creuser.

La jeune femme finit par raccrocher. Pendant ce temps, l’homme d’affaires consultait les documents que Délaïla lui avait envoyés. Bien que ce ne fut pas la première fois qu’elle faisait cela pour lui, monsieur Invictus était toujours aussi impressionné par la quantité d’informations qu’elle était capable de dénicher. Il y avait pratiquement tout ce qu’il y avait à savoir sur la vie de Michael Orzak et Jessica Plano. Parmi cet amas de données se trouvaient les institutions scolaires qu’ils avaient fréquentées, les lieux qu’ils visitaient le plus, les évènements auxquels ils avaient participé, et même les personnes avec qui ils étaient sortis. Il s’agissait là d’un travail monstrueux que Délaïla avait réalisé en très peu de temps, ce qui faisait parfois se demander à monsieur Invictus quel genre d’informations elle détenait sur lui. Heureusement pour lui, il avait déjà pris des précautions la concernant.

—–*—–

Tandis qu’elle était en route pour chez elle, le visage de mademoiselle Barnes était recouvert de larmes, ce qui avait eu pour conséquence d’abimer son maquillage. Il fallait dire que maintenant qu’elle se retrouvait toute seule, la jeune femme pouvait désormais extérioriser toute la douleur qu’elle avait enfouie. Ce n’était pas la première fois qu’elle avait une relation sexuelle non consentie avec son patron, mais les effets étaient beaucoup plus dévastateurs que la fois précédente.

Natacha Barnes avait une fois de plus été humiliée, prise pour un simple objet servant uniquement à satisfaire les désirs d’un être arrogant, narcissique, et inhumain qui se moquait complètement des dégâts que ses actes pouvaient occasionner. Alors qu’elle essayait désespérément de se concentrer sur la route, les images de ce qui s’était produit dans cette chambre 630 ressurgirent dans son esprit. Elle pouvait encore sentir son horrible souffle sur sa nuque et son odeur partout sur elle. Il fallait qu’elle s’en débarrasse le plus rapidement possible.

La fiancée de Michael Orzak s’empressa donc de rentrer chez elle, étant quelques fois à la limite d’enfreindre le Code de la route.

Au bout d’une quinzaine de minutes, la jeune femme arriva à proximité de chez elle. Natacha ne prit même pas la peine de bien garer son véhicule qu’elle attrapa ses affaires et descendit immédiatement de ce dernier. La jeune femme se précipita ensuite vers son domicile comme si sa vie en dépendait. Après quelques secondes à chercher ses clés, elle parvint finalement à mettre les pieds chez elle. Une chance pour cette dernière, son fiancé n’était pas présent en ce moment.

Natacha se dirigea à vive allure dans la chambre à coucher, jeta son sac à même le sol, et commença à retirer ses vêtements. Il fallait à tout prix qu’elle se débarrasse de cette odeur qui la hantait jusqu’à présent. Mademoiselle Barnes prit donc la direction de la salle de bain et fonça immédiatement sous la douche sans prendre le temps de retirer les quelques habits qu’elle avait encore sur elle. La jeune femme attrapa tous les produits avec une senteur qu’elle avait à portée de main et se mit à les étaler sur son corps.

  • Pourquoi…pourquoi ça veut pas partir ?! s’exclama-t-elle douloureusement tandis qu’elle frottait de toutes ses forces.

Natacha continuait de frotter désespérément, mais ne parvenait toujours pas à se débarrasser de l’odeur d’Herman Invictus. Comme si cela ne suffisait pas, toutes les images des derniers jours refirent surface. La jeune femme voyait désormais Herman Invictus s’extasier devant son malheur. Pendant ce temps, mademoiselle Barnes continuait de frictionner sa peau. Peu importe la douleur physique qu’elle commençait à ressentir, la jeune femme poursuivait son geste. C’était comme si elle sombrait progressivement dans la folie, une folie ayant pour origine Herman Invictus.

Au bout de quelques minutes, Natacha Barnes se recroquevilla sur elle-même, en pleurs. Il n’y avait rien à faire. L’odeur de son patron ne voulait pas s’en aller.

A suivre !!!

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