La promotion 55

9h45

Parmi tous les hélicoptères que mademoiselle Barnes avait aperçus se trouvait celui de monsieur Invictus qui atterrit quelques minutes plus tard à l’endroit qui lui avait été indiqué. Tandis que l’homme d’affaires descendait prudemment de son moyen de transport, un homme d’une soixante d’années, ayant des cheveux gris, et portant des lunettes de vue et une tenue de majordome noire l’attendit quelques mètres plus loin. Il était accompagné d’autres personnes vêtues comme lui à la différence que leur tenue comportait une chemise blanche.

Lorsque Herman et ses gardes du corps arrivèrent à son niveau, l’homme en noir lui dit que c’était un plaisir de le voir avant de lui demander s’il avait fait bon voyage.

  • C’était quelque peu bruyant, mais agréable dans l’ensemble, répondit l’homme d’affaires.
  • Vous m’en voyez ravi, dit-il par la suite, sourire aux lèvres.

Après ces quelques mots de bienvenue, l’homme demanda très respectueusement à Herman de lui présenter ses cartes comme le voulait le protocole.

  • Bien entendu, Michel.

Herman sortit alors deux cartes de son portefeuille et les montra. La première était noire avec son nom et son prénom inscrits en rouge-sang tandis que la seconde était l’opposée complète de la première en termes de couleur. Les gardes du corps de monsieur Invictus firent de même et présentèrent les leurs qui étaient cette fois-ci marron avec des écrits noirs. Après quelques secondes de vérification, Michel souhaita une nouvelle fois la bienvenue à l’homme d’affaires.

N’étant pas autorisés à entrer dans le manoir, monsieur Invictus se débarrassa de ses gardes qui allèrent dans la partie du domaine qui leur était réservée. Herman qui se retrouvait désormais avec Michel ; ainsi qu’un autre employé beaucoup plus jeune qui les suivait silencieusement ; lui demanda comment les choses avançaient.

  • 75 « présents » patientent actuellement dans la salle d’attente. Selon les réponses reçues, il en manque encore 40. Maintenant, concernant les autres membres, en vous incluant, nous sommes à un tiers de nos effectifs pour ce mois, répondit le majordome.

Michel fit signe au jeune homme qui les suivait silencieusement et ce dernier lui remit une tablette électronique qu’il transmit par la suite à monsieur Invictus. Sur celle-ci était affichée une liste de tous les invités déjà présents dans le manoir Lancaster ainsi que le nombre de « présents ».

  • Je constate que David n’est pas encore arrivé.
  • Non, monsieur. En revanche, il semblerait que son « présent » soit déjà dans nos locaux.
  • Son « présent », intéressant.

En entendant cela, Herman parcourut les fichiers de la tablette qu’il avait entre les mains afin de vérifier le nom de la personne que son meilleur ami avait apportée. Il fallait dire qu’après la conversation qu’ils avaient eue la dernière fois, monsieur Invictus avait alors été très curieux de connaître l’apparence de la femme dont il lui avait parlé, celle qui semblait avoir réussi à conquérir le cœur du grand requin noir, David Linch.

Malheureusement, lorsqu’il tomba sur le nom qui était marqué en face de celui de David, ce fut la grande déception. Ce n’était pas la fameuse Yasmin Ferra, mais une demoiselle nommée Olivia Price. Pas grave, il aurait sûrement l’occasion de la rencontrer lors d’un futur voyage à Londres. Pendant ce temps, l’homme d’affaires devrait se contenter de celle qu’il leur avait offerte.

  • Et en ce qui concerne la sécurité ? demanda-t-il par la suite.
  • Des hommes supplémentaires ont été postés un peu partout autour du domaine afin de renforcer la sécurité déjà présente.
  • Excellent. Le confort et l’intimité de nos membres sont notre priorité absolue. Nous n’avons pas besoin que des gens viennent fouiner dans nos affaires.
  • Vous n’avez pas à vous en faire, monsieur Invictus. Les membres du personnel ainsi que moi-même en sommes pleinement conscients, assura le majordome.

L’homme d’affaires continua de consulter les informations contenues sur la tablette avant de demander à Michel comment les choses se déroulaient au niveau des services gastronomiques. Celui-ci lui répondit alors que ses hommes et lui étaient prêts à s’occuper des moindres désirs alimentaires des invités.

  • Aussi, je tiens à vous informer que le déplacement des « présents » vers la salle d’attente devrait débuter d’ici peu, poursuivit-il.

Herman ne put alors s’empêcher de penser à Natacha Barnes. Il se dit que cette dernière devait sûrement être confuse vis-à-vis de tout ce qui se passait en ce moment. Il était vraiment très impatient de voir la tête qu’elle ferait durant la phase de mise aux enchères.

  • N’oublie pas de veiller à ce que les différents contrats soient signés par tout le monde.
  • Bien entendu, monsieur.

Le majordome fit signe à l’employé qui les suivait silencieusement et celui-ci prit un chemin différent du leur. Herman et Michel arrivèrent ensuite tous les deux dans une luxueuse salle des fêtes comportant plusieurs dizaines de tables et tout autant de chaises. Lors de la décoration de cette pièce, le mot d’ordre avait sûrement dû être « flashy ». En effet, le sol, les murs, et la plupart des décorations étaient dans un blanc immaculé. Seuls les lustres, les chaises, et les tables dénotaient légèrement par les matériaux quasi transparents dans lesquels ils étaient faits. Hormis cela, il était facile de noter la présence d’une estrade un peu plus loin, sûrement pour l’exposition des « présents » lors de la phase de mises aux enchères.

Au moment où monsieur Invictus et Michel rentrèrent dans la salle des fêtes, un certain silence s’imposa dans la grande pièce avant que le regard des personnes qui y étaient déjà présentes se retournassent vers eux. Plusieurs personnes se levèrent alors de leur siège, dont deux qui étaient très familières. Il s’agissait entre autres d’Alice Nicolay et Jennifer Homes, deux des huit membres du conseil d’administration de son entreprise. Telles des adolescentes devant la célébrité qu’elles admiraient le plus, les deux femmes vinrent à la rencontre de l’homme d’affaires avant de lui dire que c’était un véritable plaisir de le voir, s’échangeant au passage des regards meurtriers. Herman trouva cela quelque peu amusant. Peu importe l’endroit où ces deux se trouvaient, elles ne pouvaient pas s’empêcher d’éprouver une certaine hostilité l’une envers l’autre.

  • Tout le plaisir est pour moi, mesdemoiselles. J’espère que vous vous portez toutes les deux à merveille et que nos aménagements sont à votre convenance, répondit-il, un sourire ravageur aux lèvres.

L’une après l’autre, mais sans oublier de se lancer des regards noirs, les deux femmes lui répondirent qu’elles allaient très bien. Mademoiselle Nicolay était clairement exaspérée par la présence de Homes et vice versa. Cependant, afin que les choses ne prennent pas la même tournure que dans la salle de réunion de son entreprise, Herman se vit dans l’obligation d’intervenir.

  • Mesdames, mesdames, je pense ne pas avoir besoin de vous rappeler la règle numéro 3, n’est-ce pas ? Aucun conflit tant que vous êtes en ces lieux. Nous sommes ici pour avoir du bon temps et rien d’autre, rétorqua-t-il.

Les deux femmes lui dirent qu’il n’avait pas besoin de le leur rappeler, qu’elles connaissaient le règlement des séances de dégustation sur le bout des doigts. Elles rajoutèrent également qu’il n’avait pas à s’inquiéter, qu’elles n’avaient pas pour intention de bafouer les règles que les autres et lui avaient établies.

  • Vous m’en voyez ravi. Si vous voulez bien m’excuser, il faut que j’aille m’entretenir avec Lancaster, déclara monsieur Invictus avant de prendre congé des deux femmes.

La personne vers qui Herman et Michel se dirigèrent par la suite était un homme de près de cinquante ans vêtu d’un costume trois-pièces de couleur bleue. Il arborait une carrure assez musclée, une barbe extrêmement bien entretenue, et des cheveux gris sur les côtés de sa tête.

En voyant monsieur Invictus se rapprocher de lui, Lancaster qui discutait jusqu’à présent avec certains de ses invités s’excusa auprès d’eux avant d’aller à la rencontre du mari d’Henrietta.

  • Herman, content que tu sois enfin là, rétorqua-t-il lorsque l’homme d’affaires arriva à proximité de lui.
  • Bonjour, Enrick. Encore merci de nous prêter ton domaine pour l’organisation de cet évènement.
  • Je t’ai déjà dit de nombreuses fois de ne pas me remercier pour ça. C’est un immense plaisir pour moi…

Lancaster mit ensuite la main dans la poche de sa veste avant de sortir une carte de couleur rouge sang identique à celle que Herman avait montrée à Michel quelques minutes auparavant.

  • J’ai tout de même été choisi comme hôte de la séance de dégustation, poursuivit-il.
  • C’est en effet vrai. Michel m’a fait un compte rendu de l’ensemble des opérations et il semblerait que nous soyons au point.
  • Oui, que ce soit au niveau de la sécurité ou des services mis à la disposition de nos membres, tout est prêt. Il n’y a plus qu’à attendre l’arrivée de tout le monde pour commencer.

Peu de temps après le début de leur conversation, le majordome s’excusa auprès des deux hommes, prétextant alors qu’il avait d’importantes taches dont il devait s’acquérir, avant de prendre congé d’eux. Se retrouvant désormais seuls, du moins n’étant plus que tous les deux, Herman et Lancaster abordèrent divers sujets de société dont la finance, l’industrie automobile, mais également la nouvelle selon laquelle leur ami et connaissance, David Linch, s’était épris d’une certaine femme. Progressivement, les deux furent rejoints par d’autres invités qui avaient entendu cela et qui étaient curieux de savoir à quoi elle pouvait ressembler.

10h00

Alors que dix heures pile venaient de sonner, Michael faisait de nombreux aller-retour entre la salle à manger et le séjour. Sa frustration, sa colère, et sa peur avaient atteint leur paroxysme. Cela faisait désormais plusieurs dizaines de minutes que le jeune homme tentait de joindre Natacha sans obtenir la moindre réponse. C’était la première fois qu’il se retrouvait dans une situation où il ne savait pas exactement où elle se trouvait ni ce qu’elle faisait. Il était alors tenté de joindre à nouveau Enola, mais savait que cela ne lui servirait à rien, d’autant plus qu’elle l’appellerait sûrement si sa fiancée venait à prendre contact avec elle. Malgré cette réflexion, cela n’empêcha pas Orzak de prendre son téléphone portable et de composer le numéro de la meilleure amie de Natacha.

Michael ne laissa même pas le temps à la jeune femme de dire « allô » que celui-ci lui demanda immédiatement après qu’elle ait décroché si elle avait obtenu de quelconques nouvelles de la part de sa fiancée. Enola lui répondit qu’elle n’avait malheureusement pas pu la joindre.

  • Michael, qu’est-ce que…

Orzak ne lui laissa même pas le temps de finir de poser sa question qu’il lui demanda de l’informer immédiatement si elle avait des nouvelles de son côté avant de lui raccrocher subitement au nez. Bien qu’elle comprît qu’il était dans une sorte de détresse émotionnelle, le geste qu’il venait de commettre ne plut pas à mademoiselle Johns. D’ailleurs, elle décida par la suite de ne plus répondre à ses appels, et ce même si elle parvenait à rentrer en contact avec sa meilleure amie.

De son côté, Michael dont l’esprit était désormais rempli de mauvaises pensées à l’égard de Natacha continuait de chercher un moyen de la contacter ou du moins savoir l’endroit où elle se trouvait. Ce fut à ce moment qu’une idée germa dans sa tête, ce qui le conduisit à attraper ses affaires et à se rendre dans le poste de police le plus proche.

Plusieurs dizaines de minutes plus tard, le jeune homme arriva à destination. Il alla immédiatement à l’accueil où il s’adressa à l’officier en lui disant qu’il était venu signaler le vol de la voiture de sa fiancée.

  • Pourquoi ce n’est pas votre fiancée qui vient faire le signalement ? demanda l’agent des forces de l’ordre.

Il lui répondit qu’elle ne se sentait pas très bien et qu’il était donc venu la faire à sa place. Il s’agissait bien évidemment d’un mensonge, mais c’était le seul moyen qu’il avait trouvé afin de déterminer l’emplacement de Natacha. Après quelques instants de doute, le policier finit par lui remettre une fiche sur laquelle il devait indiquer toutes les informations relatives au véhicule de Natacha ainsi que le contact de la jeune femme. Bien évidemment, ce fut son numéro qu’il indiqua au lieu de celui de mademoiselle Barnes.

Quelques minutes plus tard, il remit le document à l’agent. Celui-ci lui dit ensuite que fiancée serait contactée lorsque sa voiture sera retrouvée. Avec ça, il ne lui restait plus qu’à attendre le coup de fil de la police.

A suivre !!!

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