Natacha se réveilla brusquement en sueur. Prise de panique, elle regarda immédiatement après autour d’elle. Lorsque la jeune femme se rendit compte qu’elle était de retour dans sa chambre d’hôtel et qu’elle ne se trouvait plus dans cet étrange endroit en compagnie de Simon Morgan et les autres, un certain sentiment de soulagement s’empara d’elle. En effet, elle était ravie de voir que tout ce qu’elle venait de vivre n’était qu’un cauchemar et que Michael n’allait pas l’abandonner.
Cependant, quelques dizaines de secondes plus tard, et ce tandis que les scènes repassaient dans sa tête, Barnes ne put s’empêcher d’éprouver de la culpabilité et de la peur par rapport à l’histoire dans laquelle elle s’était elle-même mise. En effet, la jeune femme se dit que les cauchemars récurrents qu’elle avait et dans lesquels elle voyait son fiancé l’abandonner étaient une sorte de prémonition, une sorte d’avertissement sur ce qui l’attendait si Michael venait à apprendre ce qu’elle avait fait. Natacha était consciente qu’elle avait agi de la sorte…qu’elle avait donné son corps pour son bien et celui de ses proches, toutefois, elle était également consciente des conséquences qui l’attendaient.
La jeune femme avait trahi la confiance de celui qu’elle aimait, avait agi dans son dos, et avait osé lui mentir tout en le regardant droit dans les yeux. Tout ceci était des actions que Michael ne saurait lui pardonner et elle en était parfaitement consciente. Non seulement lui, mais sa mère, sa meilleure amie, et toutes les personnes qu’elle fréquentait auraient beaucoup de mal à lui pardonner et à la voir de la même manière s’ils venaient tous à apprendre ce qu’elle avait fait.
Natacha savait donc qu’elle devait garder sa bouche fermée, elle en avait même l’obligation, les menaces d’Herman Invictus étant toujours d’actualité. Cependant, le poids de tous ces secrets commençait à avoir un impact profond sur elle et la jeune femme se recroquevilla soudainement sur elle-même avant de se mettre à pleurer. Barnes en avait marre, elle voulait mettre un terme à toute cette histoire et à tout ce poids qui pesait sur elle. Malheureusement, elle n’en avait pas eu le courage et ne l’aurait sans doute jamais. Elle était condamnée à vivre avec cette culpabilité et le savoir que sa relation avec ceux qu’elle aime ne serait plus jamais la même.
Plusieurs dizaines de minutes plus tard, et ce alors qu’elle avait versé toutes les larmes de son corps et souffrait désormais de maux de tête, quelqu’un frappait soudainement à la porte de sa chambre.
– Qui est là ? s’exclama-t-elle.
Barnes n’avait envie de voir ni de parler à personne en ce moment. Cependant, la personne qui lui répondit de l’autre côté de la porte se présenta comme étant un employé de l’hôtel et lui dit que son séjour parmi eux était arrivé à son terme. De ce fait, elle avait donc le choix de le prolonger ou de tout simplement libérer la chambre.
La première option qui venait de lui être proposée était très attrayante. Toutefois, avec tout ce qu’elle avait vécu au cours des deux derniers jours, la jeune femme avait besoin de retrouver ses marques, de revoir un familier. Un problème se posait néanmoins. En effet, Natacha avait peur de la réaction qu’aurait Michael lorsqu’il la verrait. La dernière fois que les deux s’étaient vus et parlé, ils avaient eu une violente dispute qui s’était soldée par elle quittant leur foyer en ne laissant qu’une simple lettre derrière elle. La perspective d’avoir un accueil chaleureux était donc très improbable. Bien au contraire, Barnes se dit qu’une autre dispute éclaterait sûrement au moment où les deux se rencontreraient. Néanmoins, elle avait besoin de voir son fiancé et de le prendre dans ses bras. Il était son tout et elle avait besoin de se sentir près de lui.
En voyant que Natacha mettait du temps à lui répondre, l’employé de l’hôtel cogna une fois de plus à la porte de sa chambre. La jeune femme lui demanda alors de lui accorder quelques minutes, ajoutant qu’elle allait libérer la pièce. Barnes se redressa donc, étant toujours assise devant la porte de la chambre, et commença à rassembler le peu d’affaires qu’elle avait amenées avec elle.
Quelques minutes plus tard, alors qu’elle était prête à libérer la pièce, le regard de Natacha se posa sur la boîte contenant la robe qui lui avait été offerte durant la séance de dégustation. La jeune femme était alors tentée de s’en débarrasser, le vêtement lui rappelant toutes les horribles choses qu’elle venait de subir. En plus, il y avait aussi le fait que Michael risquait de découvrir cela et qu’elle se voyait très mal lui expliquer la provenance de quelque chose d’aussi luxueux. Cependant, d’un autre côté, Barnes ne savait pas si elle aurait à la porter à nouveau. Avant son départ du manoir Lancaster, son patron avait été clair sur le fait qu’il ne comptait pas s’arrêter de jouer avec elle. De ce fait, il pourrait un jour lui demander de revêtir cette robe.
Après avoir réfléchi à toutes les possibilités, ce fut avec un goût amer au travers de la bouche que Natacha attrapa la boîte et sortit finalement de la chambre. Elle se rendit ensuite à la réception où elle remit tout ce qu’elle avait à restituer et sortit finalement de l’hôtel. Assise derrière le volant de sa voiture, la jeune femme ne démarra pas immédiatement. Non, Barnes se demanda d’abord si elle faisait le bon choix et si elle était prête à faire face à Michael. Elle savait que ça n’allait pas être facile ni être une expérience plaisante à vivre. Elle avait tellement merdé que ce serait un miracle si leur réunion ne se transformait pas immédiatement en dispute. Néanmoins, Natacha avait très envie de le revoir, de goûter à sa nourriture, et d’être auprès de lui. La jeune femme ayant désormais pris ses résolutions, elle démarra son véhicule et partit en direction de son domicile.
*
Dans la demeure de la famille Invictus, Marion Ségolène sortait à peine de son sommeil. Malgré la longue nuit qu’elle avait passé, l’adolescente ayant dormi plus de dix heures, ses maux de tête étaient toujours présents en plus du bourdonnement d’oreilles dont elle souffrait.
Comme pour toute personne de son âge, la première chose qu’elle chercha à faire après s’être sortie de son sommeil était de consulter tous les messages qu’elle avait reçus sur les divers réseaux sociaux sur lesquels elle était inscrite. Elle répondit uniquement à ceux de ses amis les plus proches et se rendit également compte que midi était passé depuis longtemps. Marion n’en croyait pas ses yeux. Elle avait dormi pendant plus de douze heures. Cela expliquait sûrement ou du moins partiellement pourquoi elle était aussi épuisée.
D’un autre côté, Ségolène ne pouvait pas omettre le fait que cela faisait déjà plusieurs jours qu’elle ressentait le même niveau de fatigue. À vrai dire, depuis son accident de la route, elle avait l’impression d’être à court d’énergie en plus de constamment souffrir de maux de tête couplés à des sifflements dans les oreilles.
– J’espère que ça va vite s’en aller, pensa-t-elle.
Marion n’avait clairement pas envie de passer le reste de ses jours avec un sifflement dans l’oreille. Ce handicap l’empêchait de profiter pleinement de sa vie, dans ce cas précis de sa musique, et elle se voyait très mal vivre ainsi pour toujours. Pour elle, une vie sans pouvoir écouter ses artistes favoris était un peu comme être privée d’une partie importante d’elle-même. Heureusement, son père et sa mère avaient beaucoup d’argent. Elle savait donc qu’elle aurait accès aux meilleurs hôpitaux et docteurs du monde afin de régler son problème.
L’adolescente passa de nombreuses minutes allongée sur son lit avant de décider de finalement se préparer pour affronter le reste de sa journée. Elle prit donc la direction de salle de bain et n’en ressortit qu’une soixantaine de minutes plus tard. Elle attrapa ensuite son téléphone portable avant de se rendre dans la salle à manger où un copieux petit-déjeuner devait sûrement l’attendre. Néanmoins, au moment où Marion sortit de sa chambre, cette dernière ne prit pas la peine de regarder devant elle et finit par se heurter à quelqu’un.
– Eh bien ! Tu m’as l’air d’être beaucoup plus en forme par rapport à ce que maman m’a dit.
Marion reconnut immédiatement à qui cette voix appartenait et, sans la moindre hésitation, se jeta dans les bras de son grand frère.
– Ethan ! T’es rentré quand ?
– Salut, petite, rétorqua-t-il au même moment. Je suis rentré il y a de cela deux trois heures. Quand j’ai reçu le message de maman te concernant, j’ai pris le premier vol pour la maison.
– Tu comptes rester longtemps ? Est-ce que papa est au courant que tu es là ?
– Non, il ne sait pas. Je ne l’ai pas encore vu depuis que je suis rentré. Maman m’a dit qu’il était parti à une réunion hier et qu’il n’était pas rentré de la nuit.
– Il n’est pas rentré de la nuit ? Je me demande quel genre de réunion c’est ?
– J’en ai pas la moindre idée et franchement, j’ai pas envie de le savoir. Tout ce que je sais c’est que maman est très préoccupée par ton état de santé et moi aussi d’ailleurs. Tu lui as vraiment fait une de ces peurs.
L’adolescente s’excusa auprès de son grand frère, ajoutant que ça n’avait pas été sa faute, mais plutôt celle du taré qui avait percuté leur voiture.
– Je sais. Maman m’a tout raconté pendant que tu dormais. Ce type est vraiment un salopard de première catégorie.
À cet instant, le jeune homme souhaita que le responsable de l’état dans lequel se trouvait sa petite sœur finisse non seulement ses jours derrière les barreaux, mais qu’il subisse également un sort à la hauteur de tout le stress et la peur que sa famille avait subi. Au même moment, l’estomac de Marion se mit subitement à gargouiller.
– Allons-y manger, rétorqua Ethan avec un léger sourire.
Tandis que les deux se dirigeaient vers la salle à manger, Marion dit à son grand frère qu’il n’avait toujours pas répondu à sa question. Elle voulait savoir pendant combien de temps il comptait rester à la maison.
– Jusqu’à ce que tu sois complètement rétablie, répondit Ethan.
– Et tes cours à l’université ?
À cet instant précis, Herman qui se trouvait derrière ses enfants réitéra la question de Marion et demanda à son fils comment il comptait avec ses cours. Surpris de voir leur père apparaître brusquement derrière eux, Ethan le questionna à son tour pour savoir depuis combien de temps il était rentre.
– Cela fait quelques minutes que je suis à la maison, répondit Herman en prenant Marion dans ses bras. Est-ce que tu te sens mieux ? Les sifflements ont disparu ?
– J’ai encore un peu mal à la tête et les sifflements sont toujours là.
– Le médecin a dit que ça allait durer quelque temps. Si ça ne disparaît pas d’ici mardi, nous irons le revoir pour qu’il fasse quelque chose à ce sujet. Mais revenons au sujet, Ethan. Comment comptes-tu faire ?
– On peut parler de ça plus tard ? Marion et moi nous apprêtions à aller manger.
– OK, allez-y. Je vous rejoindrai plus tard.
Herman observa ses enfants s’éloigner pendant quelques instants avant de se rendre dans sa chambre. L’homme était épuisé par le long trajet qu’il venait de parcourir en voiture ou plutôt par la longue nuit qu’il avait passé aux côtés de son acquisition. Il avait donc besoin de se reposer, et rien de mieux que sa chambre pour le faire.
Lorsqu’Invictus arriva devant la porte de sa chambre, il tomba nez à nez avec Henrietta qui sortait de cette dernière. Elle lui lança alors un regard accusateur avant de lui dire qu’elle constatait qu’il était rentré.
– Comment s’est déroulée ta réunion ? poursuivit-elle.
– Plutôt bien, quoiqu’elle ait été exténuante à certains moments. Au fait, Lancaster et Linch te passent le bonjour, répondit Herman en passant à côté de son épouse.
– Je vois. C’est très aimable de leur part. Notre fils, Ethan, est parmi nous depuis ce matin, mais je suppose que tu le sais déjà.
– En effet. Je l’ai vu en compagnie de Marion quand je suis rentré. Je l’ai même entendu dire qu’il resterait jusqu’à ce qu’elle soit totalement rétablie.
– Il compte rester jusqu’à ce qu’elle se rétablisse ? Et qu’en est-il de ses cours à l’université ?
Alors qu’il venait tout juste de s’asseoir au bord du lit, Herman lui répondit qu’il avait posé la même question à leur enfant et ajouta que ce dernier leur donnerait une réponse concrète après le déjeuner.
– J’espère qu’il a pris ses précautions avant de prendre cette décision. Ethan est quelqu’un de responsable. Il a donc dû forcément le faire.
– Je l’espère aussi, Henrietta. Je l’espère aussi.
– Je vais aller lui parler.
Madame Invictus sortit de la chambre et partit à la rencontre de ses enfants. Pendant ce temps, Herman qui avait retiré ses chaussures s’allongeait sur le lit et pensa à tous les évènements qui s’étaient déroulés au cours de la semaine. Il ne put alors pas s’empêcher d’esquisser un léger sourire quand il eut l’image de sa secrétaire, Natacha Barnes, et tout ce qu’ils avaient fait ensemble en tête. Néanmoins, ce sourire disparut immédiatement lorsqu’il se remémora l’accident de voiture de sa fille, forçant l’homme à sortir son téléphone portable et à contacter Délaïla.
– Bonsoir, Herman. Je suppose que tu m’appelles pour savoir si j’ai accompli la tâche que tu m’avais confiée, répondit la jeune femme après avoir décroché.
– C’est cela en effet. Cet homme ne peut pas s’en sortir aussi facilement, surtout pas après ce qu’il a fait subir à ma fille.
– Je te comprends parfaitement.
– J’en doute fort. En tout cas, as-tu fait ce que j’ai demandé ?
– Oui, je l’ai fait. Et j’ai failli me faire choper en sortant de chez lui, rétorqua la jeune femme.
– Bien. Tu auras droit à une prime d’ici peu pour ce service. Aussi, continue tes recherches sur Fujitora. J’en aurai besoin dans pas longtemps.
– OK. Mais concernant le récent travail, es-tu certain de vouloir faire ça ? Je comprends que cet homme ait fait du mal à…
Herman mit soudainement fin à leur appel, ne laissant pas le temps à Délaïla de finir sa phrase. Il n’avait pas besoin qu’on lui fasse une leçon de morale. Invictus était déterminé à mener son plan jusqu’au bout, et ce même si cela signifiait qu’un homme pourrait perdre sa vie. C’était le prix que cet homme avait à payer pour avoir osé faire du mal à un de ses enfants.
A suivre !!!